Lorraine Vaillancourt, lauréate

Naissance le 23 septembre 1947 à Jonquière, décès le à 

Témoignage

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Biographie

À l’évocation du prix Denise-Pelletier qui lui est remis cette année, Lorraine Vaillancourt confie ressentir une puissante émotion. « Je suis d’autant plus honorée de cette prestigieuse récompense que j’ai une admiration sans borne pour Denise Pelletier, l’une des très grandes actrices de l’histoire du Québec. Mon cœur a toujours balancé entre les mots et les sons, entre le théâtre et la musique. À 16 ans, emportée par le courant familial, j’ai finalement privilégié la musique. »

Attirée, fascinée par la complexité de certaines œuvres à l’étude, Lorraine Vaillancourt choisit rapidement la musique de son temps comme « terrain de jeux »! Diriger les créations de ses contemporains – une discipline exigeante et peu connue du grand public – devient une passion, impérieuse et généreuse, qui ne l’a jamais quittée tout au long d’une prolifique carrière.

C’est en 1968, fraîchement émoulue du Conservatoire de musique de Québec (contrepoint, harmonie, analyse, histoire, musique de chambre, direction d’orchestre, violoncelle et piano, tout de même!), que Lorraine Vaillancourt est partie parfaire son apprentissage du piano et de la direction d’orchestre à Paris, auprès d’Yvonne Loriod, pianiste réputée, ainsi que de Pierre Dervaux, chef d’orchestre et professeur à l’École normale de musique de Paris, qui, incidemment, sera directeur artistique de l’Orchestre symphonique Québec de 1968 à 1975.

On est alors pendant la très remuante période de mai 1968. « Il régnait une effervescence extraordinaire qui favorisait la créativité dans toutes les sphères culturelles. En musique, cela s’exprimait par un grand nombre de créations radicalement modernes. »

De retour au pays, Lorraine Vaillancourt entre à la Faculté de musique de l’Université de Montréal, où enseignent alors le compositeur et chef d’orchestre Serge Garant, figure de proue dans le milieu de la musique contemporaine, ainsi que le compositeur Bruce Mather. « Avec eux, j’ai fait des pas de géant », dit-elle. À la tête de l’atelier de musique contemporaine de cette faculté dès 1974, cofondatrice des Événements du neuf qui offriront au public montréalais 12 saisons de concerts consacrés à la musique d’aujourd’hui (1976-1988), elle crée en 1989 le Nouvel Ensemble Moderne (NEM), première formation du genre au pays. Pari audacieux et brillamment relevé. En plus de 25 ans, le NEM a présenté des spectacles dans tous les grands festivals, et ses tournées l’ont amené en Australie, en Chine, au Japon, à Singapour, aux États-Unis, au Mexique et dans de nombreux pays d’Europe.

Le NEM a aussi enregistré trente-deux disques et interprété des centaines d’œuvres de répertoire ou originales issues de tous les horizons, notamment du Canada.

Cofondatrice de la revue Circuit, Lorraine Vaillancourt est aussi régulièrement invitée à diriger des ensembles et orchestres ici et à l’étranger. En 1991, elle met sur pied, avec le NEM, le Forum international des jeunes compositeurs, événement biennal dont la 13e mouture se déroule en ce moment même à Montréal. Depuis la première édition du Forum, le NEM a accueilli une centaine de jeunes compositeurs de tous les continents. En résidence à l’Université de Montréal, le NEM propose chaque année de nombreuses activités aux étudiants de la Faculté de musique (séminaires, classes de maître, lecture d’œuvres, conférences…). « Tout ce travail auprès des jeunes interprètes ou compositeurs me tient particulièrement à cœur; il est essentiel de préparer le terrain pour l’avenir. Et l’avenir est du côté de cette jeunesse; c’est là que se trouvent les talents bruts qui vont permettre à notre discipline de continuer à vivre. »

Lorraine Vaillancourt poursuit sa démarche en cofondant, en 1994, les Rencontres de musique nouvelle, qui se tiendront, 20 ans durant, dans le décor inspirant du Domaine Forget de Charlevoix, accueillant compositeurs et interprètes qui gravitent autour du NEM.

Lorraine Vaillancourt passe cette année le relais. Quittant l’enseignement après 46 ans à l’Université de Montréal, elle se retire également de la direction artistique du NEM tout en conservant la direction musicale… non sans laisser poindre une part d’inquiétude face à l’avenir. « Les diffuseurs se font moins présents, moins ouverts. Il semble qu’on soit devenu plus frileux face à ce qui n’est pas formaté pour la multitude. »

Pourtant, assure la « maestra », il suffit souvent d’un peu de fréquentation pour susciter l’enthousiasme, et même un attachement profond aux musiques de son temps… Encore faut-il pouvoir les entendre et savoir les écouter! « Autant d’œuvres, autant d’invitations au voyage », conclut-elle.

Information complémentaire

Membres du jury :
Raffi Arménian
Johanne Blouin
Martine Époque
Louise Martin, présidente
Frédéric Dubois